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Trilogie "La loi de 1905 n'aura pas lieu. Histoire politique des séparations des Églises et de l'État (1902-1908)" de Jean Baubérot

L’historien Jean Baubérot signe une trilogie monumentale sur le texte de référence en matière de laïcité en France. Un travail incontournable pour mieux appréhender les enjeux du débat public sur la question.

Tome I – L’impossible « loi de liberté » (1902-1905)

La loi de 1905 n'aura pas lieu - Tome I de Jean BaubérotLa loi du 9 décembre 1905, séparant les Églises et l’État, constitue le cœur de la laïcité en France. Pourtant relativement peu d’ouvrages ont été consacrés à cet événement historique. Connaissant le fin mot de l’histoire, Jean Baubérot tend à décrire un processus logique qui a conduit au vote de la loi et à sa mise en application, effectivement pacificatrice. Pourquoi, les mêmes parlementaires qui ont voté les lois « combiste » vont adopter la « loi de liberté » (A. Briand) que constitue la loi de 1905 ? Pourquoi et comment ? Pour résoudre cette « énigme », J. Baubérot s’inspire des célèbres enquêtes télévisées du lieutenant Colombo où, dès le début, on connait le dénouement tout en ignorant les multiples rebondissements qui vont le rendre possible.

Dans ce premier tome L’impossible loi de liberté (1902-1905), J. Baubérot démontre qu’un conflit interne à la gauche républicaine elle-même s’est avéré décisif et que, fait non pris en compte jusqu’à présent, la libre-pensée elle-même a désavoué le projet de loi déposé par Combes, contribuant ainsi à sa chute. Il montre également le rôle joué dans les débats par nombre de personnalités de cette époque, dont Marcel Proust. Enfin, dans la lignée du grand ouvrage collectif L’histoire mondiale de la France paru en 2017 (sous la direction de Patrick Boucheron), l’auteur prouve qu’une vision franco-française de la loi de 1905 ne peut l’expliquer : des modèles étrangers (Mexique, États-Unis, Canada, Suisse,…) ont inspiré les auteurs de la loi et la situation internationale, fortement marquée par la guerre russo-japonaise et la crainte de son expansion , a joué un rôle.

Au final, la loi de 1905 constituera une double victoire pour la République française : victoire sur ses adversaires les plus intransigeants et, aussi, victoire sur elle-même, sur sa tentation, au nom d’un « État idéal », de refuser d’admettre la « diversité dans la liberté » (Clemenceau). Grâce à la collaboration de Dorra Mameri-Chaambi, une vaste documentation, souvent inédite, a été rassemblée. Elle est synthétisée par l’auteur en un récit qui apporte du neuf aux spécialistes tout en étant très accessible au grand public cultivé. Chemin faisant, on retrouve, d’une autre manière qu’aujourd’hui, des problèmes essentiels déjà présents dans la société française de 1905 : l’antisémitisme ordinaire, la lutte des femmes pour faire reconnaitre leurs droits, les incertitudes concernant la « culture morale » permettant de « faire société », le rôle de la science dans un État moderne…

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Tome II – La loi de 1905, légendes et réalités

La loi de 1905 n'aura pas lieu - Tome II de Jean BaubérotAlors que les débats sur la laïcité sont nombreux et vifs, il est essentiel de revenir sur le processus qui a conduit à loi de 1905, séparant les Églises et l’État. Jamais une « loi de liberté » (A. Briand), n’aurait dû advenir car deux France – la « fille aînée de l’Église » et celle issue de la Révolution – se combattaient, entraînant le pays vers une « guerre civile ». Or un retournement de situation se produit. La loi la plus importante de la Troisième République s’élabore avec des majorités variables, issues des deux camps antagonistes. Ce résultat découle de la superposition de deux conflits ; en effet à cette « guerre » séculaire de deux France s’ajoute une très inattendue « guerre » des gauches, significativement oubliée, qui met aux prises Jaurès et Clemenceau. En définitive se réalise un « équilibre des frustrations », fondé sur de nombreux paradoxes.

Cette étude, de loin la plus complète jamais rédigée sur une loi plus célèbre que connue, renouvelle son approche en traquant les oublis mémoriels, en montrant l’importance du contexte international (guerre russo-japonaise), la référence à des modèles étrangers (Mexique, États-Unis…), les stratégies des forces politiques et religieuses, les différentes visions de la Séparation qui se sont opposées et les stratagèmes victorieux de Briand, oscillant entre Weber et Marivaux. L’auteur énonce 32 thèses novatrices : elles permettent de comprendre pourquoi une loi, qui semblait irréalisable, est devenue un fait historique majeur, toujours actuel en notre XXIe siècle, où la liberté de conscience et la neutralité de la puissance publique, bref la laïcité, sont plus que jamais au premier plan de nos préoccupations.

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Tome III – L’Église catholique “légale malgré elle” (1905-1908)

La loi de 1905 n'aura pas lieu - Tome III de Jean BaubérotLe 9 décembre 1905, la loi de séparation des Églises et de l’État est promulguée. Si les deux premiers tomes de cette fresque historique ont dévoilé les difficultés menant à cette étape cruciale, ce troisième volet montre à quel point promulgation et validation ne riment pas toujours.

De nombreux prélats catholiques déclarent le 1er janvier 1906 « jour de deuil », date à partir de laquelle « Dieu n’existe plus ». Alors que les motifs d’inquiétude surgissent – la fin du « service public des cultes » et donc de leur financement par l’État, les inventaires des biens d’églises vécus comme une « spoliation » –, le pape choisit la résistance, condamnant successivement toutes les dispositions légales que l’État désire mettre en place pour l’exercice des cultes, et désavoue les évêques français. Le peuple, lui, semble avoir accepté la loi, les élections législatives de 1906 étant un nouveau succès pour la majorité sortante de gauche.

Le recours à une histoire contrefactuelle (« ce qui serait arrivé si… ») montre comment des situations en apparence inextricables ont pu être dénouées par une stratégie d’esquive qui rend l’Église catholique « légale malgré elle ». Renouvelant une historiographie trop lisse, ce troisième tome donne à lire les efforts d’un trio politique éclatant – Georges Clemenceau, Jean Jaurès et Aristide Briand – pour éviter une « guerre religieuse » résultant d’une « victoire excessive », et permettre à la République d’obtenir une victoire durable car pacificatrice.

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