Cahiers de littérature orale, n° 32, 1992

Le support de l’écrit étant absent pour perpétuer le récit, la maîtrise du souvenir repose sur des activités cognitives complexes qui entretiennent et développent la mémoire tout en permettant la créativité. Certaines cultures domptent le souvenir par des procédés mnémotechniques extrêmement rigoureux : le travail est centré sur le verbe, la face sonore des mots, le signifiant, la vélocité des sons, la virtuosité articulatoire et les permutations, la maîtrise de voix (on fait des gammes syllabiques et des exercices sonores). D’autres cultures portent plutôt leurs efforts sur le signifié et les schèmes logiques qui sous-tendent le récit ; la forme de la composition est souple. Le plus souvent les deux axes s’entrecroisent. Alors un jeu de valeurs structurelles, sémantiques, phoniques et rythmiques s’articule. La mémoire longue s’incarne dans le chant des épopées. Au sommaire : J. Dournes, “Des épopées en forêt. Plateaux indochinois” ; D. Biebuyck, “Mwindo, a Nyanga Epic Hero, and Mubila, a Lega Epic Hero. A comparaison” ; C. Seydou, “Jeu de pions, jeu des armes. Le combat singulier dans l’épopée peule” ; J.-L. Chambard, “La râmâyana des femmes dans un village de l’Inde centrale” ; M. Aufray, “La ceinture de pourpre. Émergence de l’épopée polynésienne” ; A. Rosselle, “Le pregón : survivance du système de transmission oral et musical de l’épopée espagnole”.